Parmi mes lectures récentes dont je ne vous ai pas encore parle, il y a Jugan de Jérôme Leroy. Avec Jugan, on plonge dans la mouvance des mouvements d’extrême-gauche et en particulier d’Action Rouge et de son leader Joël Jugan. Nous voilà transporter à Noirbourg dans le Cotentin. Jugan vient d’être libéré de prison après avoir purgé 18 ans pour le meurtre d’un patron d’entreprise et un braquage de banque qui a mal tourne faisant plusieurs morts. Il retourne dans sa ville natale où grâce a une de ses anciennes complices, il a trouve du travail dans un centre d’aide sociale. La, il y fait la connaissance d’Assia Raffa, une étudiante en BTS comptabilité fille d’immigrés algériens. Tout de suite, la jeune fille tombe sous le charme de Jugan, portant atrocement défiguré. Jugan joue avec elle, la manipule avant de la rejeter sous l’œil impuissant du narrateur, jeune prof d’histoire fraîchement nommé. Des années plus tard, ce dernier continue de rêver à ces événements 12 ans plus tard. Afin d’exorciser tout ça, il tente de reconstituer les faits et de comprendre ce qui a pu conduire au drame. C’est son tout dernier rêve des événements de Noirbourg qu’il nous raconte là.
Mon avis ? J’ai beaucoup aimé ce petit roman. J’ai complètement été happée par l’histoire. On le sait d’entrée de jeu, ça va mal finir. On sait aussi que Clotilde a sa part dans le drame annoncé. Mais on veut savoir ce qui va arriver exactement. Du coup, les pages se tournent sans qu’on y prenne vraiment garde.
J’ai aimé les allers-retours dans le temps que l’auteur parvient à réaliser grâce à un savant jeu de narration imbriquée si je puis dire ça comme ça. On plonge grâce au rêve du narrateur 12 ans plus tôt au moment où Joël Jugan sort de prison et revient à Noirbourg, la ou il a grandi et où il a commencé la lutte. De là, grâce au récit que lui en a fait Clothilde Mauduit à l’époque, on plonge des années avant au coeur de l’action du groupuscule qu’il a forme et des événements qui l’ont conduit en prison. Enfin ce qu’il n’a pas su ou pas vécu directement, le rêve et l’imagination sont la pour y pallier. Plusieurs fois d’ailleurs, le narrateur nous dit ne pas avoir vu ou entendu des choses mais simplement les imaginer. Ainsi il imagine la chambre d’Assia, sa façon de se regarder nue dans le miroir, les dessous chics achetés en cachette de son père. Mais qu’importe car on y croit. J’ai même trouvé cette idée de combler les trous par un récit rêve intéressante. Par contre inutile je pense d’y chercher une quelconque vérité historique. Ça reste de la fiction.
Et puis je pense que ce n’est pas ce qui intéresse l’auteur. C’est bien plus comme son titre l’indique, l’histoire d’un homme, d’un monstre au propre et au figuré, manipulateur, enragé, qui jusqu’au bout ne lâchera rien.
Bref, vous l’aurez compris sans doute, je ne peux que vous recommander Jugan de Jérôme Leroy.
La quatrième de couverture : Enseignant au collège Barbey-d’Aurevilly de Noirbourg, «en plein Cotentin, au carrefour de trois routes à quatre voies», le narrateur y voit débarquer Joël Jugan, ancien leader du groupe d’extrême gauche Action Rouge. Ce dernier vient de purger une peine de dix-huit ans. En prison, il est «devenu un monstre, au physique comme au moral». Son ancienne complice Clotilde le recrute au sein d’une équipe d’aide aux devoirs pour les élèves de la Zone. Il y croise Assia, une étudiante en comptabilité. Très vite, Assia est envoûtée par l’homme au visage ravagé. Ensorcelée aussi, peut-être, par la Gitane en robe rouge, qui, surprise à voler dans les rayons de la supérette de son père, lui a craché au visage d’étranges imprécations.
Prochaine lecture : La méthode 15-33 de Shannon Kirk.